SENTINELLES ET REFERENTS dans les lycées agricoles


Le dispositif "Sentinelle & référents" a été déployé dans les établissements volontaires depuis 2014 sur tout le territoire par la DGER via le Réseau RESEDA qui avait initié un partenariat avec La Ligue Française pour la santé mentale. De nombreux établissements se sont inscrits dans la mise en œuvre de cette démarche de prévention et de lutte contre les phénomènes de harcèlement, qui a pour originalité d’impliquer adultes et élèves au coude à coude dans une approche complémentaire de repérage et de soutien aux élèves harcelés.

La région Pays de la Loire s’est investie depuis plusieurs années dans le dispositif Sentinelles et Référents et a créé des Open Badge pour les élèves Sentinelles. On retrouve également des établissements engagés dans ce dispositif en Nouvelle Aquitaine par exemple, avec le Lycée de Blanquefort où un groupe d’élèves et enseignants viennent d’être formés conjointement tout comme la région PACA, qui a mis en place un fort partenariat avec le pôle Discriminations violences et Santé de la SEDAP, et encouragé les établissements à se former.

Agnès Dechy, chargée de mission Insertion Egalité en PACA explique la mise en place de ce dispositif


« Les établissements de formation agricoles de la région était de plus en plus fréquemment amenés à résoudre des conflits liés à des problèmes de harcèlement et de phénomènes de bouc-émissaires à l'intérieur des établissements et/ou sur les réseaux sociaux.
Une première étape a consisté à proposer des formations de sensibilisation régionales financées par le Service de la Formation Régionale de la DRAAF aux équipes des lycées sur les phénomènes de discriminations et de violences mais il est devenu nécessaire de pouvoir proposer des interventions au niveau local dans les établissements agricoles pour accompagner et former des équipes mixtes (élèves et équipes éducatives) aux phénomènes de bouc-émissaires. Il s’agissait de prévenir les conséquences de ces violences qui touchent nos élèves, que ce soit le harcèlement, le mal-être et le risque suicidaire, les comportements agressifs voire violents, les phénomènes d’isolement, d’addictions, le risque sexuel mais aussi le décrochage ou les phobies scolaires.
La formation Sentinelles et Référents, qui associe adolescent et les membres des équipes pédagogiques, administratives et techniques de l'établissement nous parait un des enjeux de la lutte contre ces formes de violences et correspond aux objectifs de notre programme régional pour l'enseignement agricole.
L'alliance du jeune et de l'adulte, matérialisé par le binôme Référents-Sentinelles nous semble être un levier de la réussite de ce dispositif dans la lutte contre ces phénomènes.
La DRAAF a appuyé la demande faite par la SEDAP à la Fondation de France pour le financement de formations sur site « Sentinelles et Référents » pour l'année 2020 dans les lycées agricoles PACA dont les directions en avait fait la demande.
Nous avons programmé en 2023 dans le cadre de Formco pour les adultes et d'un réseau régional Sentinelles pour les élèves une journée de regroupement pour faire le point des actions et partager de nouvelles idées ! »

Les formations réalisées :
Le dispositif a concerné 36 adultes et 60 élèves de différentes classes sur 7 lycées volontaires de PACA



"Il y a 7 ans, le lycée a dû faire face à de nombreuses situations de harcèlement au sein d’une classe. Pourtant, le lycée est un établissement de petite taille, 170 élèves, 70 % d’internes." Jusque-là, nous étions plutôt épargnés par les phénomènes de harcèlement se souvient Cécile Breton, CPE. Nous avons alors réfléchi à mettre en place des actions permettant de prévenir le harcèlement et non plus le subir afin de cesser de et jouer le rôle de "pompiers" une fois que l’incendie s’était déclaré.

Le Réseau RESEDA proposait à l’époque, la formation de Sentinelles/Référents animée par le pôle "Discriminations Violence Santé" de la Ligue Française pour la Santé mentale. Durant cette formation, apprenants et adultes sont sur le même pied d’égalité. Ceci est très enrichissant et il est rare de se trouver dans ce genre de situation. Les échanges sont fructueux et au fur et à mesure, le groupe se forme, des liens se créent.

Depuis, tous les 2 ans, nous formons de nouvelles sentinelles et référents. Les élèves de Secondes et de Première peuvent postuler afin de profiter de leur présence au lycée sur 3 et 2 ans. Tous les membres du personnel peuvent s’y engager. Actuellement, des agents de service, des secrétaires, des AE, des enseignants sont référents et cette mixité est très enrichissante dans le croisement des regards sur les situations abordées.

Les Sentinelles sont donc investies d’une double mission. Tout d’abord en direction de la personne harcelée : il s’agit d’aller vers elle, de ne pas la laisser seule. Il est en effet indispensable pour une personne harcelée, rabaissée, de sentir qu’elle n’est pas complètement seul et qu’elle est reconnue dans sa souffrance. Mais dans le même temps, les Sentinelles essaient d’agir sur les sur les témoins passifs, qui sont dans le déni de la violence faite à la victime, en leur faisant reconnaître la souffrance du harcelé. Il s’agit de leur faire prendre conscience du rôle important qu’ils occupent dans le mécanisme du harcèlement en ne contredisant pas le harceleur, voire même qu’il le conforte dans son action en ne s’opposant pas à lui.

Par contre l’élève Sentinelle ne doit en aucun cas se tourner vers le harceleur, c’est aux référents de s’en préoccuper. Un harceleur est une personne qui peut être ou avoir été en souffrance. Souvent lorsque nous les interrogeons, ils répondent que dans une scolarité antérieure, ils ont été victimes de harcèlement. Leurs souffrances et leur statut de victime n’ont pas été reconnus. Envisager de les exclure de l’établissement n’est absolument pas une solution. Les référents sont bien entendu des interlocuteurs pour les élèves harcelés. Mais souvent dans un premier temps les élèves préfèrent parler à leurs pairs.
Pour les référents, ce gain de temps dans le repérage des situations problématiques est l’atout majeur de ce dispositif.
En début d’année, plus particulièrement, certains élèves ont des difficultés à nouer des liens avec leurs camarades. Les Sentinelles vont les inviter à s’installer à leur table au réfectoire.
Des internes ont du mal à accepter l’internat, l’éloignement avec leur famille leur pèse. Les Sentinelles vont aller leur parler de leur expérience à leur arrivée et vont les rassurer.

Il est important de souligner que les Sentinelles ne sont pas vus comme des "balances" mais comme des aides auprès de leurs pairs, comme des tuteurs sur lesquels les uns et les autres peuvent s’appuyer, se confier.
Il est primordial de communiquer sur le rôle et les missions des Sentinelles au sein du lycée notamment auprès des nouveaux élèves. Alors, des actions de partage d’activité autour du vivre ensemble sont organisées tout au long de l’année. Nous communiquons également auprès des familles lors des Portes ouvertes et nous mettons dans les dossiers d’inscription une plaquette présentant le dispositif.
Notre autorité académique valorise ces élèves par la mise en place de badges de compétences. Leur implication est valorisée au sein de l’établissement par une mention inscrite dans le bulletin trimestriel. Les élèves mentionnent ce rôle dans leur CV et lors d’entretien pour concours ou emploi, ils sont régulièrement questionnés à ce sujet.
Chaque année, ces actions sont reconduites et bien inscrites dans le projet d’établissement. Le financement de ces actions se fait sur le budget de l’établissement. Cela démontre l’engagement de la direction pour ce dispositif.

Le climat scolaire au sein du lycée est plus serein depuis que le dispositif est mis en place. Apprenants et adultes travaillent ensemble, les projets ne sont plus simplement faits pour les élèves mais surtout avec eux. Chaque composante ne se sent plus seule, parfois isolée pour régler les problèmes de harcèlement ou organiser des actions. Certains élèves Sentinelles culpabilisaient avant, notamment au collège car ne savaient pas réagir face à des situations de harcèlement. Le regard bienveillant porté par les Sentinelles rejaillit sur l’ensemble et certains jouent ce rôle sans en avoir le titre. Le dispositif est bien installé dans le lycée, connu de toutes et tous et nous avons la volonté de le poursuivre et de l’enrichir par de nouvelles actions générées par les réflexions du collectif."


À l'occasion d'une journée de formation, les 22 jeunes "Élèves-sentinelles" du lycée Lavacant ont engagé une réflexion sur les phénomènes de "bouc-émissaires". Ils ont ainsi travaillé la question grâce à des ateliers de sensibilisation à base des jeux de rôles, des exercices de mise en situation qui permettent de comprendre ce qui se passe réellement lorsqu’un élève est harcelé. Les futurs "Sentinelles" ont été amenés à comprendre qu’une situation de harcèlement implique grandement ceux qui en sont les témoins passifs et qu’il suffit bien souvent de "ne pas laisser faire par son silence" pour aider le jeune harcelé.
Leur témoignage a fait l'objet d'une émission spéciale sur ABLOC RADIO, la Webradio du lycée